Andriamialy

L’indépendance, et si au lieu de la fêter on la revendiquait?

Le 26 juin ce sera la fête de l’indépendance. Les malgaches aiment bien préciser que c’est l’anniversaire du « retour » de l’indépendance car avant la colonisation, l’État malgache existait et son peuple était plus ou moins autodéterminé. Ce retour de l’indépendance a été le fruit de longues et coûteuses luttes menées par de valeureux et héroïques malgaches martyrs et survivants. Donc, j’espère bien choquer en posant cette question : si au lieu de la fêter on la revendiquait, cette indépendance?


Oui, un choc électrique, au bon endroit et au moment crucial, ça fait repartir un cœur qui fibrille.

En bref
Si on regarde l’histoire avec un « œil impartial » (maso tsy miangatra) comme on aime le dire en malgache, on se rend compte que la France après la Seconde Guerre Mondiale était plus ou moins obligée de rendre l’indépendance  ou bien de décoloniser par d’autres manières.Mais l’Histoire qu’on nous enseigne à l’école nous apprend qu’à Madagascar, de 1960 à 1972, il y a eu une forme de néo-colonialisme qui a débouché sur la crise de mai 1972. On sait aussi ce ou qui il y avait derrière la  « révolution socialiste » de 1972 et le pseudo non-alignement malgache, on n’était pas encore tout à fait indépendant, de toute manière.

Et puis, il y a eu 2002. Cette année là, comme dit la chanson, les malgaches dansaient et se réjouissaient car après des décennies d’errements, ils avaient trouvé en un certain Ravalomanana le guide pour les mener vers la prospérité. Et c’est vrai que pendant le règne de ce président atypique, ancien livreur de lait  à vélo devenu homme d’affaire, le pays a connu année après année une croissance « positive ». Mais les chiffres, même bien écrits ne se mangent pas, en général.

Ce que les malgaches ne savaient pas c’est qu’ils étaient entrainés malgré eux vers un capitalisme des plus crus. A l’école, on a vu de nouveaux mots et expressions à retenir pour nous qualifier : tiers-monde, quart monde, pays en voie de développement, pays pauvre très endetté. Oui, on était (on l’est toujours) très endetté. Les anciens colons sont devenus des créanciers sous le nom de FMI, Banque Mondial, Club de Paris, bailleurs de fonds, financement parallèle. Quelle désolation de lire dans les  journaux toutes les « recommandations » auxquelles le gouvernement devait se plier pour s’endetter un peu plus : privatisez, restructurez, faites ceci, faites cela!

Le capitalisme a toujours le même effet : les riches s’enrichissent et les pauvres sont plus nombreux et plus pauvres. En 2009, alors que les voyants économiques étaient, aux yeux du gouvernement,  au vert, il était facile pour Rajoelina et consorts de rallier le peuple, ou plus précisément la partie lésée, majoritaire sûrement, du peuple à son mouvement conduisant à l’exil de Ravalomanana en Afrique et à une longue et destructrice transition de 5 ans.

Le paradoxe
Voici ce qui est paradoxal, la crise ayant amené Ravalomanana au pouvoir  en 2002 était entourée de zones d’ombres inexpliquées tout autant que celle qui l’a renversée en 2009. Dans les deux cas, on disait que c’était la volonté du peuple. On soupçonnait toujours aux puissances étrangères de tirer les ficelles derrière le rideau. Pourtant, j’ai perçu qu’en 2002, il y avait beaucoup d’espoir, de ferveur populaire conduisant à un nationalisme expressif mais 2009, il y a de moins en moins d’enthousiasme dans la célébration du 26 juin.

C’est vraiment une opinion personnelle quoique des indices peuvent tendre en ma faveur.

1- Depuis quand a-t-on besoin de faire de la pub pour la fête de l’indépendance? Spot audiovisuels, affiches, tracts, débats, clips, tout est mis à contribution pour appeler les malgaches à fêter leur indépendance.

2- Depuis quand faut-il exhorter les malgaches à afficher leur patriotisme : »Mettez un drapeau sur votre maison, c’est votre manière de montrer votre appartenance à la nation! » disent-ils à la radio. Je me souviens qu’il y avait même des rumeurs selon lesquelles on enverrait des gens espionner ceux qui ne mettent pas de drapeaux à leurs fenêtres ou sur leurs toits. J’ai compris que de telles rumeurs ne peuvent pas se vérifier mais que c’était quand même un bon moyen pour « inciter » les gens à se montrer hypocritement nationalistes.

3- Et aujourd’hui, qu’est devenue cette fête dans la tête des gens? S’il y a mouvement de foule, c’est surtout pour assister aux spectacles gratuits : le podium où les artistes se relaient pendant plusieurs jours, les feux d’artifices et le défilé militaire. Mais même ces activités, gratuits attirent de moins en moins de personnes.

Le stade de Mahamasina et le lac Anosy , où se déroulent les feux d'artifices, le podium et le défilé militaire. Photo : Lemurbaby
Mahamasina et le lac Anosy , où se déroulent les feux d’artifices, le podium et le défilé militaire. Photo : Lemurbaby

En vérité, je ne suis pas le seul à avoir fait cette remarque. Chaque année: 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, la communion du peuple, la liesse générale, la joie de tout un pays, rien de tout cela n’a été au rendez-vous. On a trop instrumentalisé, trop politisé cet évènement. Chacun voulait faire sa propagande en se montrant ou au contraire en boycottant cette journée.

Alors, si au lieu de la fêter, on la revendiquait, cette indépendance?

Si au lieu faire danser les jeunes et les enfants autour du podium, dans cette rue, nuit après nuit, afin qu’ils boivent, se perdent, s’exposent aux viols et aux meurtres, on profitait du 26 juin pour faire de l’éducation civique?

Si au lieu de dilapider des millions de dollars pour les éphémères spectacles pyrotechniques, on finançait des projets pour réduire la pauvreté?

Si au lieu de payer pour de nouvelles tenues aux soldats sans guerre et pour de la peinture neuve sur leurs toussant véhicules, on formait et on dotait en matériel les forces de l’ordre pour qu’ils assurent la sécurité en ville et dans la campagne?

Surtout, si au lieu de fêter le 26 juin, les dirigeants essayaient de travailler pour que Madagascar soit vraiment indépendant? Car l’indépendance ce n’est pas un collier porte bonheur, ce n’est pas un t-shirt en vert-blanc-rouge. L’indépendance, c’est être capable de décider par soi-même; ne pas devoir céder aux chantage des créanciers. C’est avoir les moyens d’être autonome. Ah, c’est tellement simple : IN-dépendant. Tant que tu dépends des autres, tu ne l’es pas vraiment. Alors, malgaches, notre expression imagée nous sied fort bien car on a l’indépendance mais il ne faut pas qu’on danse tous déjà… « avant la délivrance« .

 


A Madagascar le truel continue

Scène de western : ils sont trois, trois shérifs ou trois bandits on ne sait pas vraiment, mais pour l’instant ils tiennent Madagascar en haleine, en joue, en otage.

Eux, ce sont El Presidente, Gouverneur et Lower House

El Presidente est un Cow-boy latino solitaire : il écoute, mais n’entend pas, il regarde, mais ne voit pas. Pourtant, il n’est ni aveugle, ni sourd, il est juste indomptable. Méfiez-vous de son sourire, car ce n’est jamais un gage de sympathie. Et il ne faut jamais tourner le dos à El Presidente, ses meilleurs amis ont en déjà payé les frais. Son arme favorite est son flacon d’acide. Et aujourd’hui, il le pointe vers Lower House dont il promet la dissolution en cas de mouvement brusque.

Gouverneur est un gros frenchie âgé. Il se dit pacifiste et il se protège derrière El Presidente. En vérité c’est lui qui tient le robinet du réservoir d’eau de la ville de main ferme; c’est lui qui donne les ordres à toute la bande. Il exécute les ordres d’El Presidente, mais doit aussi ménager les ardeurs de Lower House. Et aujourd’hui, il se tient entre les deux, entre deux feux.

Lower House, justement, le natif, se dit représentant du peuple et a promis de ne pas oublier sa famille nombreuse s’il tire le jackpot. Son arme préférée, qu’il pointe vers Gouverneur est son revolver « motion » . Le problème de Lower House est sa Schizophrénie. C’est simple, il ne peut rien faire s’il n’est pas d’accord avec lui-même et avec lui-même et aussi avec lui-même. D’où sa lenteur de décision. En fait, il ne dégaine jamais rapidement que lorsqu’il remplit son propre ventre.

Voilà la scène. Elle vous fait rire? Pourtant elle nous fait pleurer, car ces trois gars sont nés de la même mère, notre mère à nous tous. Ils ne sont pas supposés se tenir là à se faire peur et à se faire des coups bas, ils sont censés travailler ensemble pour tirer la famille de la misère.

Oui, vous trois, vous avez réussi, vous avez le pouvoir, l’argent, la notoriété. Arrêtez de vous battre et pensez à vos petites sœurs et vos petits frères.

Pour lire l’équivalent en malgache de cet article, cliquez ici.


Traduction : Ramano be galona, le tirailleur oublié

Le groupe de folk malgache Lolo sy ny tariny a composé cette chanson « Ramano be galona » en s’inspirant d’un personnage véridique, tirailleur pendant la Seconde Guerre, que j’ai peut-être déjà croisé une ou deux fois dans mon enfance.

RAMANO BE GALONA Ramano plein de médailles (galons)
Lolo sy ny tariny

Ny tanin-dRamano Le pays de Ramano
Dia tany zanatany Était une colonie
Ny tany tamin’izany La Terre en ce temps là
Mbola feno zanatany Était pleine de nations filles (colonie)

Nanainga i Ramano Ramano devait partir
Tsy afaka nandà! Sans pouvoir refuser
Nirongo basy lava Armé d’un fusil
Nilanja barida Le barda sur le dos

Ady no naleha C’est la guerre qui l’attendait
Tsy anaovana kinanga On n’y avait pas droit à l’erreur
Nitifitra na maty Il fallait tirer ou mourir
Nefa olon-janatany Alors qu’il était citoyen d’une colonie (nation fille)


Naverina Ramano On a renvoyé Ramano chez lui
Tsy maty nefa adala ô Pas mort mais devenu fou
Ny vanja zay nipoaka Les bombes qui explosent
Nanjanaka ny lohany Ont colonisé sa tête

Galonan’dRamano ô Des médailles de Ramano
Dia nisy tena izy é Il y en avaient de véritables
Fa nisy nampihomehy Mais il y en avait de bien drôle
Nampihoraka ny ankizy Et qui faisaient rigoler les enfants

Satria kapsily Car des capsules
Sy fatina bilao Et des boulons usés
Korintsana eny an-tratrany Tintinnabulaient sur sa poitrine
Grade be tsy zakany De gros grades insoutenables

Nalevina omaly On l’a enterré hier
Ramano be galona « Ramano plein de médailles »
‘Reo mpananihany Les moqueurs
Nanjary nitomany Sont devenus les pleureurs

Ny tanin-dRamano Le pays de Ramano
Dia tany zanatany Était une colonie
Ny tany tamin’izany La Terre en ce temps là
Mbola feno zanatany Était pleine de nations filles (colonie)

vidéos :

https://www.dailymotion.com/video/xabvv5_ramano-be-galona-par-lolo-sy-ny-tar_music


Madagascar : juin, le mois festif

Depuis tout petit, j’ai toujours aimé le mois de juin à Madagascar, c’est un mois festif. Les Malgaches l’appellent même parfois Asaramanitra, le mois où l’on fête le Nouvel An. En effet, on y fête l’indépendance et comme Asaramanitra est devenu synonyme de fête, il s’applique ici aussi. Et cette année 2014, on a plus de raisons encore pour faire la fête.

Juin, d’abord, c’est le mois de l’enfance

« Les mois de… » comme quelqu’un que je connais les appelle, c’est comme la publicité. On fait de la publicité pour des trucs qui ne marcheraient pas autant sans elle. Et malheureusement, l’enfance a besoin d’un « mois de… » , car sans cela on oublierait beaucoup de choses à faire et à ne pas faire pour nos progénitures. Donc, pendant tout le mois, on va voir des annonces, des affiches, des évènements où les enfants vont exposer leurs situations et demander des améliorations. On va entendre et réentendre les slogans comme : « Non, au travail des enfants », « Stop aux abus sexuels sur les mineurs », « Non à la violence sur les enfants », « Non au tourisme sexuel », « Ose dire NON! »,  « Les enfants ne sont pas des souvenirs », « Les enfants ont le droit d’avoir une maison, de la nourriture, de l’éducation et des jeux », etc. Eh oui…on a malheureusement besoin de le répéter.

Madagascar enfant travail
Photo : Yves Picq

 

Les enfants, eux, qu’est-ce qu’ils en pensent? Ils ont surtout en tête les grandes vacances qui arrivent à la fin de ce mois pour la plupart d’entre eux. Enfin, s’ils vont à l’école, s’ils ne travaillent pas encore; s’ils sont en bonne santé ou au moins ont accès à des soins médicaux; et s’ils peuvent avoir des jouets ou au moins arrivent à les fabriquer.

Car pour les privilégiés, et même pour les autres,  la liste des jeux d’hiver est longue (l’hiver malgache est froid et sec). Il y a  les jeux en plein air comme le cerf-volant (papango), la planche à roulettes (kalesy), les pétards (tsipoapoaka), la dinette (tsikononkonona), le saut à l’élastique, le foot sur rizière asséchée. Ensuite, on a les jeux avec les pierres : tantara (récits), tanisa , tso-bato (jongleries). Puis, il y a les jeux de société : la katro (famille de l’awalé), le célèbre fanorona , le vitsiliha jeu de stratégie qui se joue grandeur nature. Ce ne sont que des exemples et ces jeux sont gratuits.

Ensuite, il y a la Pentecôte

La Bible dit que le Saint-Esprit est descendu sur les apôtres le jour de la Pentecôte, c’est-à-dire le jour du Chavouot juif. Bizarrement, cette fête chrétienne n’a pas autant de succès auprès des Malgaches que Pâques et Noël, pas assez de Saint-Esprit peut-être. L’impératif que le croyant, non pratiquant s’impose c’est d’aller à l’église à Pâques et à Noël. Mais la Pentecôte c’est surtout le jour pour les sorties, les pique-niques. C’est facile, dès le début de l’année, les associations, les familles, les églises, les entreprises, tout le monde va choisir dimanche ou lundi de Pentecôte pour la sortie annuelle.

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Photo : https://adventiste-manjakaray.org

Pour vous décrire à peu près comment se déroule une telle sortie : le matin, on attend ensemble les cars pour un départ prévu à 7 h 30, mais qui va avoir lieu à 9 h, c’est le rendez-vous à la malgache (fotoan-gasy). Arrivée sur les lieux à 10 h-10 h 30, donc, il y a une petite réunion ou un petit culte où on donne les consignes : ne pas salir partout, surveiller les enfants, ne pas se baigner dans la rivière, utiliser les toilettes au fond à gauche, etc. A midi ou plutôt à 14 heures, on mange lorsqu’on a réussi à arracher les garçons du terrain de foot improvisé. L’après-midi, les chanceux auront droit à de belles animations : karaoké, jeux, saynètes, danse. Sinon, certains trouveront qu’il faut profiter de cette réunion pour débattre de sujets les plus ennuyeux avec comme animateur des débats un oncle assez bourré.

Et la fête des pères

Comme les Français, les Malgaches célèbrent leurs papas le 3e dimanche de juin. Comme souvent, le père de famille va en profiter pour se donner en cadeau un truc qui ne passerait pas dans le budget familial en temps normal. Sinon, ce jour rend un peu trop évident que dans la société malgache, la mère est beaucoup plus importante que le père. Une chanteuse le dit dans un de ses titres « Hafa ihany i Mama », … très difficile à traduire, je dirais : « Maman est quand même spéciale ». Donc, c’est la fête des pères, et papa a quand même participé à la procréation des enfants, c’est lui, souvent qui travaille pour apporter la nourriture, c’est lui qui apporte la discipline, la Cour suprême à la maison. Mais lorsqu’on compare fête des mères et fête des pères… »hafa ihany i mama ».

25 juin, il y a le réveillon.

Je vous ai parlé au début du fait que le jour de l’indépendance du 26 juin est fêté comme un jour de l’an. C’est d’autant plus vrai, car le 25 soir on fait le traditionnel réveillon avec la fête des lampions (arendrina). Les enfants sortent puis se regroupent par famille ou par quartier et font la procession avec leurs arendrina respectifs, soit vers le marché, soit vers une place publique, pour se rallier avec d’autres groupes.

lampions

Ces dernières années, les Chinois ont aussi fondu sur cette opportunité. A part les babioles clignotantes qui attirent les enfants, ils proposent même des lampions malgaches, en papier, made in China.

feux

Et c’est, donc, tout à fait normal que les feux d’artifice pour la fête de l’indépendance soient proposés le 25 juin soir. Si vous êtes à Antananarivo le 25 juin, il faudra éviter de programmer un rendez-vous entre 17 et 21 heures du soir aux alentours du lac Anosy. En, effet, il y aura, agglutinés

Puis, l’indépendance.

Le 26 juin, fête de l’indépendance, est un jour férié. C’est vrai qu’en 2013, ce n’était pas une journée exceptionnelle pour moi. Cette année, il y aura comme d’habitude le défilé militaire à Mahamasina, le stade omnisports et le président va recevoir des gens à Iavoloha, le grand palais présidentiel de la banlieue sud de Tana. Pendant ce temps, les Malgaches seront pour la majorité en famille pour être ensemble.

Ah, j’aimerais revivre ces temps où j’étais fier d’arborer les couleurs nationales dès le 26 juin au matin; où j’étais fier des militaires qui défilaient avec honneur et prestige; où je chantais l’hymne national la main sur le cœur. Qui pourrait ranimer la flamme patriotique chez les Malgaches et surtout chez les jeunes ? Je ne sais pas, et eux non plus. J’ai peur surtout qu’ils  profitent  de la journée pour se saouler et embêter les filles.

Et le Mondial 2014!!!

Cerise sur le gâteau, juin 2014 sera le début du Mondial au Brésil. Madagascar n’a jamais été qualifié pour cette compétition et ce n’est pas près d’arriver tant que les mêmes incompétents restent à leur place pour gérer le sport roi à Madagascar. Donc, les Malgaches suivent les équipes africaines qui elles, n’ont jamais dépassé les quarts de finale. Les Malgaches se rabattent, alors, sur le reste, le beau reste des demi-finalistes. Traditionnellement, ils sont fans du Brésil, de l’Argentine, des « rainiboto » (les rugueux) allemands, l’Italie, la France et l’Espagne. C’est-à-dire qu’ils vont suivre ces équipes et surtout PARIER sur leur victoire.

Les paris, que beaucoup de Malgaches aiment, iront de quelques milliers d’ariary à plusieurs millions par match. Donc, certains vont encore se faire spécialistes des pronostics et miser leur argent de poche ou leur salaire, mais ils risquent de perdre gros, car 2014 réserve peut-être des grosses surprises. A ce propos, Mondoblog avec les Observateurs mettent sur un blog tous leurs news, analyses, réactions venant de dizaines de pays.

 

Voilà, bon mois de juin à vous tous et à tous les Malgaches!


Le vieux joueur de valiha

Il y a des personnes que l’on voit souvent : les membres de la famille, les collègues, les amis. Il y a aussi des personnes qui ne font que passer dans notre vie mais, parfois, ces dernières laissent des traces indélébiles. C’est simple, certaines personnes ont partagé avec vous une année, un mois, un jour, un trajet, un regard et des années et des années après ce moment partagé est imprimé dans votre tête comme une photographie en couleur. Moi-même, j’ai une très mauvaise mémoire des noms. Je n’arrive pas à retenir ni à me souvenir d’un prénom au bout de quelques jours. Pourtant, le visage,  les paroles et les actes de certaines personnes arrivent à me marquer pour toujours.

Tenez, un exemple : un jour, au bord de la mer, j’ai rencontré un vieux monsieur, malade. Et, donc, je ne me souviens plus comment il s’appelait, son petit prénom. Il ne paraissait pas faible, il était hardi. Il était grand et fier. Son visage était fripé par l’âge, mais on voyait qu’il était un beau jeune homme. C’était un Malgache de type asiatique et un peu européen aussi. Sa peau n’était pas très foncée, ses cheveux étaient courts et bouclés, son nez long et droit et ses lèvres minces, minces pour un Malgache je veux dire. Et puis, ses yeux résumaient tout le reste. Ils brillaient d’intelligence, mais de temps en temps s’éteignaient et le vieux monsieur passait soudain de vieux sage plein de conseils à vieux fou proférant des gros mots et des idioties. Et puis, ses yeux étaient jaunes. C’est-à-dire que ce qui devait être le blanc des yeux était jaune comme un citron bien mûr. Je ne suis pas médecin, mais avec le peu de connaissance que j’ai, je dirais qu’il avait le foie très atteint et un Alzheimer très avancé.

Il avait une très belle valiha. La valiha c’est cette sorte de sitar en bambou qu’on a hérité de nos ancêtres indonésiens. Le son de la valiha est proche de celui de la harpe et du koto. Il jouait de cette valiha comme un dieu. Et il avait aussi des souvenirs, beaucoup de souvenirs. Il nous parlait de ses voyages, lui et sa valiha parcourant le monde entier : l’Europe, l’Asie, les Amériques. C’est quand il évoquait ses voyages que ses yeux s’illuminaient le plus. C’est comme si on était derrière le projecteur d’une salle de cinéma et on imaginait bien que les images défilaient dans sa tête comme dans un vieux film. Et moi, qui écoutais, j’en ai rêvé. Qui ne rêve pas de Paris ou de New York ? Il avait aussi toujours de bons conseils, ponctués de jurons; beaucoup de bons conseils.

Il nous a aussi conté l’histoire de l’Antsaly, le phœnix de la mythologie malgache.

Mais oui, tout est au passé, en effet quelques jours, ou quelques mois après notre rencontre, j’ai aussi vu le nom et le visage de cet homme dans la rubrique nécrologique des journaux. J’ai oublié son prénom, c’est vrai. Peut-être, pourrais-je vous dire son nom de famille, car oui, il était célèbre. Mais je ne vais pas le faire. Je pense que c’est mieux de finir cet article sans citer le nom de personne. Vous savez ? c’est toujours rageant de voir les gens qui louent, qui exaltent la mémoire d’un défunt alors que du vivant de la personne, et surtout lorsqu’elle est devenue vieille, malade et « inutile », on la laisse se débrouiller toute seule.

Mais jusqu’à aujourd’hui, je remercie le ciel d’avoir rencontré ce vieux monsieur. Il mériterait d’avoir un monument, une école ou une rue à son nom, c’est vrai. Mais, sauf erreur de ma part, on n’a pas de rue Andy Razaf, le célèbre jazzman américano-malgache, ou Rakoto Frah, l’éternel flûtiste. Si ça existe, ce n’est pas assez connu. Peut-être qu’on attend d’avoir de nouvelles rues et c’est pas près d’arriver.

J’aime l’idée d’avoir pu soutirer un peu de sagesse de cet homme. Car, dans la vie, les gens recherchent l’argent, la connaissance, le pouvoir, mais la sagesse est tellement plus rare et plus précieuse. C’est pour ça que cette histoire n’est pas triste. Les êtres humains passent et la majorité ne laisse pas de trace. Mais tel le phœnix qui renaît toujours de ses cendres, il y a toujours quelqu’un qui doit prendre la relève et  je voudrais être l’un d’eux. C’est notre expérience et nos savoirs qui sont nos meilleurs legs pour la prochaine génération. Et c’est en reprenant le flambeau et en le portant toujours plus haut qu’on fait honneur à nos prédécesseurs.

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Valiha aux Philippines et à Madagascar


10 mondoblogueurs au noms presque malgaches

J’ai remarqué que, par pur hasard, ou par d’autres mécanismes inexpliqués, des noms ou prénoms se retrouvent dans plusieurs langues avec des significations différentes.J’en ai parlé ailleurs. Mais l’exercice que je vais faire ici c’est d’énumérer 10 mondoblogueurs avec des noms malgaches, ou presque.

A dire vrai, il y a plus de 10 mondoblogueurs dont les noms signifient quelque chose en malgache. En fait, avec un peu d’imagination, on peut trouver une signification en malgache de tous les mots. Ceci réconforte un peu les théoriciens qui croient encore à la madagascaro-centricité du monde.

Donc, il y a d’abord Aly. Dans la dialecte du sud de Madagascar, « aly » c’est « la guerre ». Mais dans le malgache officiel, c’est un prénom qui se rapporte à l’art. Les mots qui s’en rapprochent sont « mikaly », travailler avec soin, et « miangaly », faire quelque chose en parlant de l’art.
Ensuite, il y a Ba  qui n’est pas un prénom usuel mais plutôt un diminutif de tous les prénoms commençant par « Ba » chez nous : les Basile, Barnabé, Baptiste et autres. Sinon, « ba » signifie chaussettes. Mais c’est aussi un mot enfantin pour désigner les bisous. Si tu dis à un bébé malgache « ba! allez, ba Papa! », il va te faire un gros bisous baveux.
En parlant de Ba, il y en a un autre Ba qui a comme autre prénom Samba . Samba n’est pas un prénom malgache mais c’est un mot oublié qui se rattache à la première fois. Il ne reste plus que le verbe »Sambany » (première fois) ou en répété : « Sambasamba » qui fait de jolis chansons en rythme brésilien.
Baba , c’est pareil que pour « Ba ». C’est aussi un mot enfantin mais il signifie « à manger ». Donc, c’est souvent un surnom plutôt qu’un vrai prénom à Madagascar. Sinon, Baba c’est Papa dans certains dialectes, comme dans ce clip « Baban’i Rokia »
J’aime bien Issa  et Issa . En malgache, « isa », c’est le chiffre 1 (alors que le nombre 1 est « iray »).  Le prénom en malgache n’est pas Isa mais Misa. Être le premier, je pense que c’est un bon leitmotiv dans la vie.

Kelly par contre n’est pas très flatteur, c’est le surnom qu’on donne aux petits. En effet, le mot malgache « kely » signifie petit. Mais ce n’est pas non plus péjoratif. Lorsqu’on a deux personnes avec le même prénom dans le même groupe, par exemple 2 Andry, le prénom le plus répandu de l’île, le plus vieux devient « Andry Be » (le grand Andry) et le plus jeune « Andry Kely » (Le petit Andry).

Solo, c’est un vrai prénom. Il signifie « remplacement ». On le donne souvent en souvenir d’un aïeul  ou d’un parent disparu. Cela donne Solondraibe (celui qui remplace son grand-père) ou Solonirina (Le remplacement désiré) ou Solonomenjanahary (le remplacement accordé par le Créateur) en guise de réconfort de la perte d’un autre enfant, par exemple.
Leïla, c’est un joli prénom féminin mais on a un homonyme malgache qui est « lehilahy » et qui signifie homme. Donc, c’est plutôt un contre exemple car aucun malgache ne va appeler sa fille Leïla sans risquer qu’elle se fasse taquiner à l’école.
Lina, comme Fara, Malala, Tina, Sue, Nour etc. sont , je pense, des prénoms qu’on a, justement, donné à des petites malgaches parce que ce sont des prénoms étrangers qui ont une signification en malgache. Ceci dit, « Liana », le prénom malgache signifie « curieuse » et se lit normalement « Line » du fait que les voyelles en terminaisons sont souvent muettes. Pour avoir la prononciation à l’italienne, on a des prénoms avec un h à la fin « Linah ».
Enfin, je voulais finir avec Saka, qui n’est pas du tout un prénom malgache mais signifie chat, ou chatte au féminin. Quand les premiers félins sont arrivés à Madagascar, on les appelait des « kary ». Aujourd’hui « kary » ne désigne plus que les félins redevenus sauvages. En effet, quand les français sont arrivés, les malgaches les ont entendus traiter ces bestioles de « sac à puces ». D’où les deux noms actuels de ces stars du web « saka » et « piso ».  Mais les petites malgaches préfèrent qu’on les surnomme « piso » parce que serait migniooonnn!

Voilà, j’ai réussi à donner 10 noms de blogueurs à découvrir sur la plateforme mongoblog. Mais, plus sérieusement, le principe des prénoms est nouveau (de 2 siècles) pour les malgaches. Auparavant, les enfants naissaient en étant le fils de, la fille de ou le petits-fils, petite fille de quelqu’un. C’est à l’adolescence, qu’on lui choisissait un nom en rapport avec son caractère, soin physique ou sa destinée selon l’astrologue du coin.

Donc, s’il y a plainte sur la longueur de nos noms, ce n’est pas vraiment notre faute. En plus de léguer leur nom de famille, comme les européens leur ont appris à le faire, nos parents veulent toujours mettre leur petite histoire dans nos prénoms. Le résultat, en plus d’être long peut donner une histoire incompréhensible. Mon nom complet RANAIVOSON Andriamialy, par exemple signifierait : « Monsieur le fils du cadet, le prince qui fait de l’art. » et c’est presque vrai sauf que je ne suis pas fils du cadet.