Légendes de Madagascar : les monstres
Dans les contes et légendes de Madagascar, il y a plein de monstres. Comme les animaux et les plantes de cette ile continent, la plupart de ces êtres sont endémiques mais certains sont des espèces importés d’Afrique, d’Asie et d’Europe. Bon, après le fanany et le tanalasosa de mes articles précédents, j’ai décidé de ne plus les citer un par un mais de faire ce long dossier pour en dire le plus possible de ce que je connais sur les créatures qui peuplent nos cauchemars les plus fous.
Juste le pauvre fosa
Madagascar n’a pas la réputation de paradis terrestre uniquement à cause des belles plages, des sites touristiques époustouflants, de la végétation hors du commun et des filles angéliques. C’est aussi une île continent où il n’y a presque pas d’animaux dangereux.
Le seul animal potentiellement mortel qui se trouve en nombre actuellement dans beaucoup de régions de l’île est le crocodile malgache. Ce cousin éloigné du Crocodile du Nil pullule dans certaines rivières et fait aussi l’objet d’élevages intensifs pour son célèbre cuir. Mais dans ce cas précis, l’adage malgache s’applique très bien : « Izay milomano ihany no maty an-drano » (Seuls les baigneurs se noient).
Si on reste sur la terre ferme, on ne risque pas grand chose. Le plus gros prédateur est le timide fosa. Ce carnivore, ni félin ni canin aurait évolué du tenrec comme beaucoup de petits mammifères malgaches. Mais il est presque impossible de l’apercevoir dans la nature tellement il est craintif. Il y avait autrefois des lémuriens carnivores mais ils n’ont pas survécu à l’arrivée des humains, tout comme l’hippopotame nain de Madagascar et l’oiseau géant Æpyornis. Ces animaux, survivants ou éteints et peut-être aussi un hominidé de type Homme de Florès dont certains chercheurs supposent l’existence mais que personne n’arrive à en découvrir les preuves peuvent expliquer les monstres de nos légendes, nos fantasmes et de nos mystères irrésolus. Enfin, si vous êtes chercheur, étudiant ou seulement passionné par la découverte de nouvelles espèces, sachez que des parties de la Grande Ile sont encore « vierges » et les missions d’exploration de ces régions immaculées apportent annuellement une dizaine de nouveautés par an à la diversité biologique de Madagascar.
Animaux et Cryptozoologie
Imaginez-vous prendre part au premier débarquement des premiers malagasy venant d’Asie. Imaginez-vous découvrir un pays abritant l’oiseau le plus massif ayant jamais existé, des lémuriens aussi petits que des souris qui dorment dans les feuilles et d’autres atteignant 200 kg. Des trucs que tu crois que c’est de gros insectes alors que c’est des mini caméléons. Cinq siècles plus tard, faut-il en pleurer? 90% de tout ce qu’il y avait a disparu, et il ne reste que les légendes.
Lalomena
Ce serait un grand animal, robuste, qui vit dans l’eau. Il est de couleur rouge (mena) et pourvu de deux grandes cornes. Il parle et il chante. S’il sort de l’eau, chacun de ses pas est un tremblement de terre et s’il siffle ça fait un nuage. On le chasserait pour ses cornes qui sont de très beau matériaux pour faire des bijoux.
Ici, un conte en malgache sur le lalomena.
C’est ce lalomena que les chercheurs rapprochent de l’hippopotame nain. Les fouilles archéologiques ont confirmé l’existence de l’hippopotame nain à Madagascar cohabitant avec les premiers malgaches jusqu’à leur extinction. Dans les autres légendes, on lui attribue le nom de soavalindrano (cheval d’eau).
Le songomby
Il s’agirait d’un bœuf (omby=zébu), d’un cheval ou d’un mulet agressif et mangeur d’hommes qui vit dans les grottes et dans les forêts. D’autres textes le rapprochent du dragon. D’autres encore le confondent avec le lalomena. L’hippopotame étant assez dépendant de l’eau, cette dernière théorie est très discutable. Je pense plutôt au zébu qui revient très vite à l’état sauvage lorsqu’il se perd en forêt. Sauf que s’il est vraiment carnivore, c’est peut-être autre chose. Un lion naufragé? Enfin, certains le comparent aussi au centaure qui fait partie des bibiolona (mi-homme mi-animaux) que je vais aussi développer plus tard.
Le Fanany
Le fanany, dont je vous ai déjà parlé c’est le grand serpent à 7 têtes. Cette légende est surement importé d’Asie et elle est liée à la croyance de la réincarnation. En effet, on pense que lorsqu’une personne meurt elle peut se réincarner en cet animal. Un petit fanany n’a qu’une seule tête et les 6 autres poussent avec l’age. Lorsqu’un fanany arrive près d’un village. Il faut lui demander son nom et il répondra par des hochements de têtes. Ceci fait, on l’enduit d’huile, on tue un bœuf en son honneur et on lui offre du miel. Il portera bonheur à celui qui le découvre.
Ici, un conte en malgache sur le fanany.
Dans les légendes urbaines actuelles, on attribue aux fanany des missions à l’instar des fantômes des séries modernes. On dit que ce sont des personnes ayant eu une mort subite qui reviennent achever une tâche ou se venger de leur meurtrier. Ces histoires fabuleuses sont périodiquement relayés par les grands quotidiens malgaches. Il s’agit par exemple d’un bébé qui serait constamment suivi par un gros serpent et que ce serpent serait la mère morte à l’accouchement et qui veille sur son enfant. D’autres fois c’est la famille d’un jeune homme dans un village reculé qui voit tout le temps un gros serpent menaçant roder autour de la maison. Après avoir interrogé tout le monde, il s’avère qu’un jeune homme aurait tué quelqu’un par accident et se serait enfui. Il aurait fallu demander pardon au fanany pour qu’il arrête de menacer les gens ou plus dramatiquement on aurait offert le fautif pour que le fanany le mange afin de lever la malédiction sur la famille.
Maroandavaka
C’est un petit serpent malgache dont le nom signifie « beaucoup dans le même terrier ». Surement à cause de l’hiver rude dans certaines régions de l’île, les serpents de cet espèce se regroupent parfois mais les malgaches leur confère de ce fait une vie sociale comme celle des abeilles.
La légende dit que la personne qui tue un maroandavaka ne doit pas être vue par un autre de ses congénères ou bien il doit demander pardon à toute la famille de maroandavaka en offrant un sacrifice. Sinon, en effet, le maroandavaka témoin irait ameuter ses colocataires et tous vont pourchasser le meurtrier. Ce dernier verrait alors des petits serpents partout et, pour se défendre, va en tuer de plus en plus. Mais plus il en tue, plus il y en a d’autres jusqu’à ce que qu’il se fasse dévorer par des milliers de maroandavaka en mission de vendetta. Les cadavres qu’on retrouve désossés dans la forêt alimentent cette légende proche de celle du fanany.
Les autres serpents
Parmi les autres serpents, il y a le manditra, un boa qui est réputé venimeux même si les boas ne le sont jamais. Les légendes parlent d’un gros serpent, qui serait ce manditra, qui viendrait la nuit dans le lit d’une femme qui allaite. Il écarterait doucement le bébé de sa mère et téterait le sein de celle-ci qui ne se doutera de rien, croyant que c’est son bébé. Ce n’est qu’au matin que l’horreur et l’effroi vont envahir le mari en voyant ce gros serpent repus de lait maternel gisant dans le lit et sa femme inerte à côté. Mais bon, c’est peut-être juste un reptile attiré par la chaleur humaine puisque lui, il a du sang froid. La femme est juste tombée dans les pommes. Ou c’est juste un parabole?
Le fandrefiala est un petit serpent inoffensif mais quand on était petit, les plus grands nous racontait ça : dans la forêt, le promeneur non averti se repose sous un arbre. Une feuille tombe sur sa tête, puis une deuxième, puis une troisième. Soudain, le fandrefiala, « raide comme une saillie » comme J. Brel dirait tombe sur lui, tête la première et le transperce de part en part. Donc, méfiez-vous car les feuilles qui tombent sont des avertissements du fandrefiala et si vous ne bronchez pas, il vous prendra comme une menace. Aujourd’hui je me dis que le fandrefiala de cette légende est peut-être un serpent planeur méconnu. Mais de l’autre côté, il doit être très intelligent pour savoir compter jusqu’à 3 et puis s’il est aussi une Épée de Damoclès, il est redoutable, tellement que ce n’est pas plausible. Mais dans cette histoire, si le fandrefiala est juste au mauvais endroit au mauvais moment, qu’est-ce qui a transpercé le monsieur de part en part?
Les bibiolona (Humanoïdes, et mi-homme mi animal)
Ne croyez pas que l’Homme a découvert Madagascar quand les européens sont venus pour la première fois. Ne croyez pas non plus que les asiatiques situés à des milliers de kilomètres auraient pu devancer les africains à juste 400 km. Et peut-être que les premiers africains qui sont venus ont été reçus par des gondwanais qui sont restés là depuis que l’Afrique a laissé Madagascar voyager seul il y a des millions d’années…qui sait. Du moins, il y a des légendes qui font réfléchir.
Zazavavin-drano (sirène)
Malgré cette image libre de droit que j’ai utilisé pour illustrer, la sirène malgache n’est pas mi-humain, mi-poisson. On dit que sous l’eau vivent des gens comme nous, hommes, femmes et enfants. Ils travaillent parmi nous, ils boivent, ils mangent et le soir ils rentrent chez eux … sous l’eau.
Un jour, mon grand père aurait pêché au bord d’une rivière accessible par un chemin qui se termine justement au bord de la rivière. Il était caché derrière un bosquet, donc, on ne le voyait pas. Lui, il a vu quelqu’un descendre sur le chemin. Un monsieur, normal, bien habillé approchait derrière lui mais il était distrait quelques secondes par une prise. Il s’est ensuite retourné pour saluer le nouveau venu mais ce dernier a disparu.
Ce genre de récit est commun surtout chez ceux qui font de la pêche. Les coups de soleil peut-être. La légende « officiel » dit que le peuple de l’eau est très riche, les femmes sont très belles, très aimantes, dévoués et elles acceptent de se marier avec les humains. Les hommes de l’eau seraient très méchants et très jaloux aussi. Si quelqu’un se marie avec une femme de l’eau, elle lui apportera tout ce qu’il voudra mais il doit juste respecter un interdit. Selon les contes, l’interdit serait pour le mari de manger du sel ou de dire un mot bien précis sous peine de perdre sa femme sirène et toute la richesse qu’il en a obtenu. Quelquefois, des témoignages de personnes se disant appartenant au peuple de l’eau ou ayant eu comme conjoint l’un d’eux alimentent notre presse à sensations.
Bobel le centaure
Le centaure Bobel est une créature récente dans le folklore malgache. Il a été l’un des héros des séries de bandes dessinés KODITRA dans les années 80 dans lesquelles il dévorait les méchants. Aujourd’hui, c’est la description typique du bibiolona (mi-homme, mi-animal). Un blogueur malgache fait remarquer qu’il remplace à merveille le vazaha (étranger) qu’étaient les français de la colonisation. En effet, on attribuait à ces européens des pouvoirs magiques, des humeurs sanguinaires et des mœurs de cannibales voleurs de cœurs.
On dit que parfois la nuit, vers minuit ou 1 heure du matin, on entend dans les rues de certains quartiers de Tana des bruits de sabots accompagné de râlements et suivis de cris d’horreur. Le lendemain, on découvre le corps éviscéré d’un malheureux. Car, tout le monde le sait, les bibiolona sont des voleurs de cœurs, eux aussi.
Ces histoires ou des variantes sont aussi relayés par la presse avec cet article en malgache par exemple où un monstre mi-homme mi-cheval avec les yeux qui brillent d’une lumière bleue violeraient des femmes du côté de Mananjary.
Vazimba
Le Vazimba est masina (sacré) et je ne suis pas prudent de le qualifier de « monstre », c’est peut-être fady (interdit). Le vazimba est un humanoïde de petite taille. Les descriptions sont pléthores mais jamais consensuelles. Voici justes quelques exemples : grand yeux, grosse tête, longs bras, longs doigts, longues ongles, etc. Beaucoup s’accordent à dire actuellement que les vazimba sont les premiers habitants de l’île. Ils ont été soit chassés et exterminés soit incorporés par les nouveaux arrivants (des malgaches actuels se disent descendants de vazimba) et de ce fait n’existent plus en tant que groupe à part. Les différentes descriptions font penser à des pygmées ou à des hominidés atteints de nanisme insulaire à l’instar de l’Homme de Florès. Leur disparition, l’absence de documents ni même de tradition orale assez fiable à leur sujet ainsi que l’imagination débordante des malgaches ont fait de ce « peuple » de véritables divinités olympiennes anonymes.
Ainsi, actuellement, les endroits dites « où il y a un vazimba » sont sacrés : les rivières, les lacs, les bois, les tumulus, les grottes, des régions entières, etc. Ces places sont réputés interdit de porc, mort ou vivant, d’oignon, d’alcool, et de gros mots. Et surtout il est interdit d’avoir un acte sexuel complet dans ces endroits aux risques de subir un penis captivus garanti.
Et voilà que les légendes contemporaines en rajoutent. Quelqu’un a pissé sur la tombe d’un vazimba, son sexe a grossi à l’extrême amenant l’opprobre sur sa tête – Des jeunes ont pique-niqué avec de la mortadelle de porc au bord d’un lac de vazimba et ont bu de l’alcool avant de faire une balade en pirogue (le porc et l’alcool ainsi que l’ail sont fady aux vazimba); bilan 4 morts – Un couple adultère a fait l’amour derrière un tombeau de vazimba (c’est un tumulus et on suppose que c’est un tombeau de vazimba) et vous connaissez la suite (coïtus captivus) – un homme a violenté un passant, c’était un vazimba déguisé et l’homme a eu le cou qui s’est tordu tout seul.
Les sceptiques vont me dire que le sexe qui enfle c’est éléphantiasis, le naufrage des jeunes ivres c’est un accident, le cas de « captivus » c’est à cause du stress et du sentiment de culpabilité et le cou qui se tord est une crampe. Vous avez peut-être raison mais si vous passez des vacances chez nous et que vous visitez un endroit à vazimba, n’essayez pas de faire le malin.
Kalanoro
Etymologiquement, Kalanoro c’est « la fille qui s’appelle Noro » et Noro qui se lit comme Nour est peut-être lié à ce prénom arabe masculin qui veut dire « lumière »; le Kalanoro étant un mâle et il a des pouvoirs de divinations et de magie. Ceci dit, c’est juste une opinion personnelle.
Le kalanoro est un humanoïde, de très petite taille, le corps recouvert par sa chevelure (ou par des poils?), il a de longs doigts et de longs ongles très durs. Il a une voix de petite vieille au nez bouché. Certains le confondent avec le vazimba lui même. D’autres le présentent comme un hominidé, une espèce humaine qui a peuplé la région du Betsileo avant l’arrivé des sapiens sapiens (la page de ce lien est en français 🙂 ). Enfin, certains croient que Kalanoro est un lémurien nocturne proche de l’Aye Aye (photo) ou l’Aye Aye lui-même dont la morphologie est tellement horripilante qu’il doit faire très peur la nuit.
Si on arrive à en attraper un, le Kalanoro est un génie malin, un croisement entre le génie de la lampe et un gremlin. Il exauce tous les vœux de son propriétaire ou bien il lui ramène de l’or, des pierres précieuses ou du mercure comme dans ce lien d’un site d’informations sérieux de Madagascar. Par contre, il ne doit jamais être vu par une autre personne que son propriétaire. Il dictera aussi les autres fady (interdits) à son propriétaire ainsi que ses désidératas qui, dit-on, irait du miel jusqu’au sacrifice humain. Aujourd’hui, dès qu’un malgache réussit, très vite, la rumeur va dire qu’il élève un Kalanoro chez lui.
Bon, on dira que ces histoires ne sont que des affabulations. Tant de fois, des escrocs ont filoutés de pauvres gens en se cachant derrière un lambahoany (tissu) et en dictant des idioties et des demandes de paiement d’argent en se pinçant le nez. Toutefois, si la croyance du Kalanoro a émergé et a subsisté jusqu’à nos jours, ce n’est peut-être pas un hasard.
Ci-dessous un vidéo d’imitation de Kalanoro
Tanalasosa
C’est le mort vivant. dont je vous ai déjà parlé aussi. Il a 7 vies. Dans ma région, on l’appelle « lolo vokatra », c’est à dire à peu près « le fantôme qui sort de terre ». Chaque « ethnie » malgache possède ses propres relations avec la mort. Pourtant, toutes les régions vénèrent les mêmes ancêtres (razana). Le coin nord-est de la maison malgache est appelé « zoro firarazana » (coin pour honorer ancêtres) peut-être à cause de l’origine asiatique commune à tous les malgaches. Et globalement, on suit les même rituels pour l’enterrement avec des variantes selon les régions. Partout, on fait, entre autres, une veillée funèbre pour permettre aux familles et aux amis de venir présenter leurs condoléances. Mais aussi, la veillée funèbre permet de s’assurer que le mort ne se relèvera pas. Dans le sud, pays d’où vient la légende du tanalasosa et dont les habitants sont de grands éleveurs de zébu, cette veillée dure jusqu’à ce que le dernier zébu du défunt soit tué et mangé par les « convives »; car c’est comme une grande fête. C’est à dire que s’il était riche, ça peut durer en semaines ou en mois. Ceux qui y ont déjà assisté disent que le mort commence à pourrir sur place. On a à ce sujet un proverbe qui dit « ny anongotsongoina ny maty hono dia tahotra ny handevim-belona » (On pince les morts pour éviter d’enterrer un vivant).
On sait que le vaudou vient d’Afrique et si les haïtiens savent fabriquer des zombies, qui dit que les malgaches, tristement célèbres pour l’utilisation de la sorcellerie à tous les étages, n’ont pas aussi hérités de cette technique de leurs ancêtres africains? Je rappelle que le zombie en Haïti est une personne qui a été endormi profondément grâce à un produit chimique maintenant identifié (la totrodotoxine) qui simule la mort. Elle est enterrée par ses proches qui la croient décédée et c’est après que l’enchanteur la récupère dans la tombe en lui administrant l’antidote et un autre drogue de soumission la rendant apathique et obéissante. Aujourd’hui, les rumeurs qui circulent à Madagascar racontent qu’on aurait ouvert un caveau pour inhumer un mort et qu’à la stupeur général, les restes de celui qu’on a enterré en dernier se trouvaient derrière la porte. C’est parmi les pires morts, si c’est vrai. D’autres fois ce sont des résurrections miraculeuses qui sont relayés par la presse. Il s’agit de personnes déclarées mortes par le médecin qui reviennent à la vie pendant la veillée funèbre.
S’il y a des morts vivants à Madagascar, on pourrait peut-être l’expliquer par la science mais je pense que certains mythes ne doivent pas être brisés de peur de briser la société qui les a créé.
Les fantômes
Le tanalasosa ou lolo vokatra n’est donc pas un fantôme puisqu’il est fait de chair et d’os … enfin ce qu’il en reste. Est-ce que les fantômes existent? je ne le crois pas mais je sais que les gens ont vu, entendu, senti des choses…
Ambiroa (double)
Les malgaches considèrent le dédoublement comme une chose normale et non comme un pouvoir spécial. Lorsque quelqu’un pense à un endroit ou à une personne, qu’il est dans la lune, c’est à dire qu’il se perd dans ses pensées, qu’il est dans cet état que les connaisseurs appellent auto-hypnose, on dit en malgache que son ambiroa (double) est parti (lasalasa ambiroa). Son esprit voyage alors à l’endroit ou près de la personne de son rêve éveillé sous la forme de … lui même. C’est à dire qu’il est en deux endroits en même temps. Grâce au téléphone ou à internet, le transport de son double est parfois vérifié lorsque la personne qu’il a visité dans son rêve appelle dans la foulée pour dire : « J’ai cru t’apercevoir dans la rue tout à l’heure, alors je t’appelle pour avoir de tes nouvelles » – « Ah oui, je pensais justement à toi » – « Ah, c’était ton ambiroa que j’ai vu alors »
Juste pour le fun, une chanson jazzy titré « lasalasa ambiroa » de Lalatiana
Angatra, lolo, matoatoa, avelo
Ce sont les fantômes de gens morts. Il y a peut-être des nuances entre ces trois désignations. Les occidentaux eux ont « fantôme, revenants, esprits frappeurs, etc ». Je dirais que dans les expressions on dit d’une maison hanté que c’est « une maison abritant un lolo ». Lorsqu’on menace quelqu’un que « si je meurs je reviens te hanter », on dit « hanangatra aho ». Si on voit un fantôme on dit souvent qu’on a vu un « matoatoa » ou un « avelo ».
Pour finir, une note d’humour pour vous éviter de faire de mauvais rêves après avoir lu cet article. Figurez-vous les improbables homonymes malgaches lorsque « lolo » veut dire à la fois fantôme et papillon. Pire, angatra signifie à la fois fantôme et blennorragie. Alors, précisez bien le contexte lorsque vous dites « J’ai un fantôme chez moi », de peur que l’on ne comprenne pas quelque chose d’autre…un papillon par exemple 🙂 .