Nouvelle : Rija, le détective du futur

Article : Nouvelle : Rija, le détective du futur
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24 septembre 2015

Nouvelle : Rija, le détective du futur

Un jour, je vais vraiment écrire des livres….enfin je pense…aujourd’hui, j’ai juste envie de mettre des trucs qui me fascinent dans un petit récit de SF. Pour essayer.

Mardi 09 Septembre 2031. Rija se lève. Il en avait assez de rêvasser sur son lit depuis 15 minutes. A 5h37, son réveil a sonné doucement alors qu’il émergeait d’un rêve lucide pendant lequel il a essayé de résoudre ce mystère qui le tiraille depuis 3 jours : qui a volé le Ranavalo?

Le Ranavalo est un diamant D de quelques 6530 carats qui a été déterré par accident en 2024 d’une mine de charbon au Sud Ouest du pays. Il a été exposé depuis sous haute sécurité au Musée National, jusqu’à son vol, bien sûr. C’est un trésor national qui a rapporté beaucoup d’argent à l’État grâce aux expositions ici mais aussi partout dans le monde. C’est quand même le plus gros gemme pur, non taillé au monde.

Rija essaie de noter tous les éléments intéressants de son rêve. Il raconte son songe à sa montre qui enregistre le tout. « La porte de derrière a été ouverte de l’intérieur, puis refermée avant d’être fracassée pour faire croire qu’elle a été forcée ». Maintenant, il en est sûr car dans son rêve, il a essayé plusieurs fois de défoncer cette porte et ce n’est qu’avec l’autre pièce volé, le « Buste de femme en bois de rose » qu’il réussi à faire cette marque sur la porte. Il faudra qu’il demande une nouvelle analyse pour trouver des traces de bois de rose à proximité de la porte mais ce n’est pas le plus importantMaintenant, il est certain au moins de l’existence d’un complice à l’intérieur du musée. Sauf si le coupable est tout simplement un employé du musée, De toute façon, il peut entrevoir une nouvelle manière de poursuivre son enquête.

Maintenant, Rija peut vraiment démarrer sa journée. Après une douche rapide dans la cabine automatisée, (d’ailleurs, peut-on toujours appeler cela une douche?), il s’assoit à table pour manger devant sa télé. Il aime bien regarder la chaîne très élitiste humanis 20 qui diffuse tantôt des clips avec des images en stéréogramme cachées et tantôt des émissions avec un message en morse à vitesse 98 en bruit de fond, Cela lui permet d’assimiler toutes les infos utiles tout en regardant, vraiment, des clips et des documentaires. Il n’y a que pour les films qu’il préfère le format S.S. (sans surcouche) comme les classiques du début du siècle. Pour le reste, c’est une habitude et aussi un gain de temps considérable qui lui permet de quitter son appartement très vite chaque matin. Avant de sortir, il s’ajuste devant son écran miroir. Il se regarde de face, de derrière et de profil. Les cheveux longs et la barbichette sont à la mode mais ils l’obligent à adopter quotidiennement ce style épuré, léger et tendance avec ce haut en tissu très fin, très lisse mais opaque qui arrive à peine à cacher la membrane pare-balle règlementaire à l’intérieur et ce pantalon moulant qui trahit son célibat.

Dans sa voiture, Rija se connecte tout de suite à son poste de travail. Quand la voiture glisse doucement et surement au milieu du traffic, Rija comprend que le trajet prendra du temps mais il se rechigne à prendre le volant et à emprunter la voie des conducteurs. Rija ne fait pas partie de ces nostalgiques qui continuent de polluer l’air avec leurs épaves à essence complètement manuelles au nom de la liberté; ceux qui se tuent régulièrement dans des accidents et qui en seraient fiers. S’il doit conduire, dans le cadre d’une course poursuite ou bien s’il est pressé, c’est forcément une voiture moderne, bien sécurisée et écologique. Et aujourd’hui, il préfère revoir tous les éléments de son enquête. C’est ce qu’il est en train de faire et en même temps, il réécoute ses enregistrements des jours précédents sur fond de musique classique.

Ne pas pouvoir désigner tout de suite le coupable le rend nerveux. Un sentiment l’obsède, la pitié. Tant de fois il a regardé les anciennes séries policières à la télé. Tant de fois il en a deviné l’issue dès le tiers de l’épisode. C’est à peine s’il trouve du plaisir à résoudre ces mystères de bas étage. En fait, ce qui l’intéresse c’est la manière dont le scénariste va faire durer l’incompréhension du héros. Jamais ces héros des films des années 00 avec leur outils rudimentaires n’ont impressionné un agent moderne comme Rija. Mais aujourd’hui, il se sent comme un de ces inspecteurs ou détective privé. En fait, il sait déjà qui est le coupable mais il ne veut pas le dévoiler. Ce n’est pas parce qu’il veut faire durer le suspens mais c’est parce qu’il ne peut pas comprendre.

Rija regarde par la fenêtre. Il lui reste 15 minutes avant de débarquer au commissariat et faire son rapport. Il sort vite son tapis à hologramme et met son casque de visualisation cérébrale. Rapidement, l’ordinateur recrée en relief toute la scène qu’il a enregistré et paramétré et qu’il est en train de peaufiner en temps réel avec ses gestes et sa pensée. Il voit les gardiens qui font des rondes et qui quittent la pièce centrale du musée pour ne revenir que dans 30 minutes. Il voit le Conservateur , M. Randria qui travaille tard,débrancher l’alarme,  entrer dans la pièce, et prendre le diamant et la statue.  Ensuite, ce dernier sort par la porte de derrière et disparaît. Et c’est là que le plus bizarre commence. Le coupable revient, vite, par le même chemin. mais cette fois les mains vides  Il rebranche l’alarme et sort par la grande porte en prenant congés auprès des gardiens. Et juste avant la prochaine ronde, le revoilà qui revient masqué avec un bélier pour forcer la petite porte. Cela fera retentir l’alarme mais avant que les gardiens n’arrivent sur place, il est déjà loin. Ah bon sang! C’est vraiment trop facile.

Rija zoome sur le malfaiteur, il lui arrache, virtuellement, le masque. Il le voit avec un sourire en coin; un vieux monsieur de 60 ans qui boitille de vieillesse et qui vient de faire croire qu’il a fait un aller retour sur 200 mètres de couloirs et de salles en moins de 2 minutes. Surement, il doit se dire qu’il a fait le coup du siècle. Et Rija sait que s’il le fait arrêter, cela va aller très vite : interrogation, détecteur de mensonge et lecteur neuronale. Ce vieux fou va passer le reste de sa vie en prison. Et pourtant, c’est un homme qui a ce petit étincelle dans les yeux. Rija aimait beaucoup lui parler même s’il a ressenti que Randria voulait le perdre dans des sujets, intéressantes, mais sans aucun lien avec l’affaire. Il parlait de manuscrits, de trésors ou d’Indiana Jones.

Et pourtant, ce serait trop classique. L’histoire d’un employé modèle qui, à la veille de sa retraite, se rend compte qu’il a raté sa vie. Rija comprend trop bien cette situation. Cela lui rappelle son père qui est quasiment mort de fatigue en travaillant. Il se souvient que son père n’a pas survécu longtemps après sa retraite et qu’il n’a pas pu en profiter. D’ailleurs, le maigre rente qu’il percevait suffisait juste pour survivre et pas pour faire le tour du monde. Rija se remémore la promesse qu’il lui a fait sur son lit de mort de devenir l’homme le plus juste de la Terre. Et c’est pour cela qu’il rend justice aujourd’hui dans les rangs des forces de l’ordre. Mais cette fois-ci, la justice ne semble pas aussi clair dans sa tête comme les fois précédentes.

L’hologramme devient flou à mesure que Rija se perd dans ses pensées. Mais un objet clignote juste à la place du diamant. C’est un papier. Un papier blanc avec un filigrane et un texte sans sens qui disait :

« Rakoto sent
Il dit : c’est quoi ce vin?
Je ne bois pas
A cause d’une main adroite »

On croyait d’abord à une coïncidence mais Rija vient de comprendre que les premières lettres des 4 lignes composaient sont prénom. Rija, le fameux détective, qui résout toutes les énigmes grâce à sa grande maîtrise des techniques nouvelles et héritées. Il ne serait pas étonnant que le voleur, l’intelligent Randria, ait deviné que ce sera lui qui prendra en charge cette affaire. Donc, c’est un message pour lui? Le filigrane, ça disait quoi? 2645. Rija interpelle sa voiture : « Appelle toutes les unités pour venir au musée avec les chiens et les scanners et fouiller aux alentours ». C’est décidé. Dès que le diamant est retrouvé, Rija va mettre dans son rapport que c’est un canular. Des plaisantins ont juste volé, puis déposé le trésor, et une statue en bois à 120 pas à l’intérieur d’un terrain vague attenant au bâtiment pour démontrer que la sécurité est dérisoire dans ce musée.

Quand Rija débarque de sa paresseuse voiture autonome, des collègues exhibent déjà le Ranavalo. « – C’était à 100 mètre par là-bas, mais comment tu as su? » lui demanda-t-on. « – Tu sauras tout dans mon rapport mais tout va bien, quand même? ». « – On aurait dit que la pierre est tombé et il manque un petit morceau d’environ 2 carats. On a retrouvé quelques débris au bord de la route. On estime que ces débris sont maintenant éparpillés sur les roues de voitures et les semelles de chaussures. » « – Surement » répondit Rija? « Surement »…

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