Madagascar : 5 exemples de métonymie, notre cache-misère

Article : Madagascar : 5 exemples de métonymie, notre cache-misère
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30 mai 2014

Madagascar : 5 exemples de métonymie, notre cache-misère

Madagascar, notre pays est riche, mais notre peuple vit dans la misère. C’est comme dans beaucoup d’autres pays, c’est vrai. Moi, je le dis, l’émergence, pour Madagascar, c’est un taxi-brousse déjà en marche. J’espère seulement que ce bus sera gros et bondé au maximum, car aujourd’hui, il ressemble plutôt à un de ces petits Mazda à 14 places dans lesquels on fait la mêlée à 50 pour rentrer.


1- Les bas quartiers
Premier exemple : Antananarivo n’a pas de bidonville. Lorsque la pluie tombe, la grosse averse tropicale, c’est la catastrophe en l’absence de réseau d’égouts aux normes. Et le manque d’entretien du peu qui existe fait déborder les canaux : l’eau pleine de déchets entre dans les rues, dans les rez-de-chaussée et dans les voitures prises au piège. Naturellement, ceux qui peuvent payer plus cher louent les appartements situés en hauteur. Donc, quand les journaux titrent : « Les bas quartiers sont cela, les bas quartiers sont ceci », ils veulent parler des gens défavorisés.

2- Mpiasa tena : les auto entrepreneurs
Dans le pays, il y a d’abord une majorité de paysans, éleveurs et agriculteurs. Ils n’ont pas des emplois règlementés, ils n’ont pas de couverture sociale et ils ne payent pas tous l’impôt. Et puis, il y a le reste qui travaille dans l’industrie et le secteur tertiaire. Mais au final, il y n’y a qu’une infime partie de la population active qui travaille dans le formel. On ne peut pas considérer les autres comme des chômeurs. En fait, si on leur demande ce qu’ils font dans la vie, ils répondront  » je travaille pour moi-même « . Cela voudra dire beaucoup de choses. Elle ou il est vraiment auto-entrepreneur mais son entreprise, PME, micro ou peut-être même nano-entreprise consisterait parfois à revendre 1 kilo de cacahuètes par jour. Il n’y a pas de sot métier.

3- la maladie grave
On a un dicton que je traduirai librement par  » : Est-ce pour un rhume que la brède mafane peut guérir qu’on va tuer un jeune poulet? « .  Chez nous, on connaît des tas de plantes, de recettes de grand-mère et autres gris-gris pour les maladies. On les utilise en priorité car, la médecine occidentale est toujours trop chère. Mais vient le jour où ni la brède mafane, ni le poulet ne suffisent plus, il faut aller à l’hôpital. C’est simple, dès que l’on sait qu’un proche ou un ami est à l’hôpital, c’est une maladie grave. Il faut y aller pour la ou le réconforter et pour aider la famille avant qu’il ne soit trop tard. Voici le message : « Rakoto est à l’hôpital, il a une maladie grave ». AVC ? Accident de la route ? Infarctus ? Cancer en stade final ? Personne ne sait, c’est juste une maladie grave.

4- La mort subite

Deux jours après, Rakoto est mort, c’est une mort subite.  » Malheurs! Rakoto est mort subitement après une maladie grave. Je te dis, 5 jours avant, il se portait bien! « . C’est là que les spéculations vont bon train :  » C’est de la sorcellerie, c’est pour ça qu’il a eu cette grosseur sur son abdomen, c’est quelque chose qu’on lui a fait avaler « .  » Non, c’est un interdit qu’il a bravé, il y a des vazimbas dans sa région « . Il y en a même qui meurent subitement sans passer par la case maladie grave. Mais que la mort soit accidentelle ou pas, provoqué ou non, lorsqu’on ne sait pas, c’est une mort subite, le dossier est clos. Ah, si l’autopsie devenait obligatoire pour toute mort suspecte, il y aurait sûrement des choses à découvrir.

5- Les dahalo,bandits de grand chemin

Traditionnellement, dans le sud de Madagascar, certains peuples éleveurs ont fait du vol de bétail un rite initiatique pour les jeunes. Ce sont les dahalo. Ce qui fait que dans la tête des gens, les dahalo ne s’attaquaient qu’à des éleveurs et qu’ils se contentaient de voler les zébus dans leurs enclos.

Aujourd’hui, pourtant, et ce n’est plus dans le sud de l’île, des bandits armés jusqu’aux dents pillent, brûlent, violent, tuent, attaquent des convois, des villages, mais dans le langage populaire et dans la presse, ce sont toujours les dahalo. Pour moi, une ou plusieurs centaines d’hommes armés qui attaquent un village, c’est pas les dahalo, c’est au moins une milice armée. Tout un village qui attaque un autre, ou des dizaines d’hommes massacrés , car suspectés d’avoir voulu voler des zébus, c’est pas les dahalo, c’est quelque chose que je ne veux même pas nommer.

Parce que, oui, parfois on aimerait bien que les choses ne soient pas réelles, mais elles le sont. Ne soyons plus hypocrites et affrontons ces réalités !

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